Personnalité de la semaine

Alice Cole, une coureuse hors du temps

Alice Cole a 83 ans. Elle court. Elle gagne des médailles et bat des records. C’est une minuscule force de la nature, une joyeuse et souriante anomalie, comme si les années passaient et refusaient de s’arrêter pour s’occuper de son cas à elle aussi. Notre personnalité de la semaine, choisie athlète vétéran de l’année 2016 par la Fédération québécoise d’athlétisme, est un phénomène.

On dit qu’il n’y a qu’une justice sur terre, celle qui nous fait tous vieillir d’un jour ensemble. Le temps aurait-il oublié de veiller sur cette dynamo nommée Alice Cole, quelque part entre ses compétitions, sa passion pour l’ordinateur et ses petits verres de vin ?

Au 800 m, explique son entraîneur Dorys Langlois, sa performance indique que sa forme est à 111,91 % du maximum qu’on constate normalement chez les femmes de son âge. Au 5 km, elle est à 98,17 %, au 400 m, à 97,93 %… Elle détient d’ailleurs de nombreux records canadiens sur courtes distances, sur piste et en extérieur et même sur de plus longs parcours, sur route. Actuellement, elle détient le record du monde du 800 m, dans sa catégorie évidemment.

Est-on étonné de la savoir suivie de près par des spécialistes en gériatrie de Montréal, qui veulent comprendre ce qui lui donne ces capacités ? Surtout que l’athlète a des problèmes de cholestérol, mais réussit très bien à contrôler tout ça grâce à la course, notamment, et donc à offrir de bonnes performances quand même. « Donc j’ai diminué la viande rouge, mais je mange des sucreries, j’adore ça », dit-elle.

Et en plus, en 2015, elle a été gravement blessée dans un accident de voiture, dans un taxi qui l’amenait à une course. Commotion cérébrale, fractures – côte, pied, clavicule –, coupures qui ont nécessité des interventions chirurgicales à la paupière.

Aujourd’hui, elle en est presque parfaitement remise.

Comment explique-t-elle sa forme ?

« Ce qu’on me dit, c’est que je ne perds pas de capacité, comparée aux autres », explique Alice. 

« Ma vitesse diminue moins que celle des autres avec les années. Mais mon vrai secret magique, c’est que je ne me mets aucune barrière en partant. Je veux me dépasser. »

— Alice Cole

Alice Cole, qui travaillait autrefois dans les télécommunications, aujourd’hui à la retraite, une ancienne passionnée de vélo notamment, a commencé la course alors qu’elle avait 70 ans. Probablement qu’à cette époque, ou même quand elle était plus jeune, elle ne courait pas particulièrement vite. Ce qui la distingue, aujourd’hui, c’est donc sa longévité.

« Et je veux vraiment gagner », dit cette femme qui a déjà survécu à un accident d’avion. « J’ai perdu un de mes records du monde l’été dernier, mais je vais aller le rechercher. Je tripe assez… »

Son calendrier est rempli non seulement de ses entraînements quotidiens au stade de McGill et au MAA au centre-ville, mais aussi de courses à venir, au Canada, aux États-Unis, en Europe. « Mais j’ai diminué le nombre pour me concentrer sur les plus importantes », note cette dame qui avoue qu’elle a quand même une petite faiblesse liée à l’âge : un peu de surdité.

Ne rien laisser au hasard

Pour planifier son horaire et enregistrer ses progrès et performances, Alice fait des graphiques. Aller sur son Mac pour organiser tout ça fait aussi partie de son quotidien. Et pour mieux comprendre les capacités de son ordinateur, elle fréquente assidûment la boutique Apple du centre-ville, où elle s’inscrit régulièrement à différents types de formations. « J’aime les stats et j’aime apprendre à faire des graphiques. En fait, j’apprends toutes sortes d’affaires », explique-t-elle.

Et elle aime aussi tenir à jour sa page Facebook. « C’est beaucoup d’ouvrage, tout ça, mais j’adore ça. » Elle a maintenant, grâce à cela, un groupe de coureuses de sa catégorie qui promet de courir avec elle quand elle aura 90 ans.

A-t-elle une diète particulière pour garder ses jambes et son cerveau en forme ? De la viande rouge maigre une fois par semaine, cerf, bison, cheval, sinon du poisson, du chocolat, du vin rouge. Elle aime aussi particulièrement se faire des jus de fruits tous les matins. « Ce matin, c’était pomme, cantaloup et framboises », lance-t-elle.

Elle s’amuse avec ça, mais rien n’est laissé au hasard. Elle a un objectif : une course de 5 milles à New York en juin. Une autre compétition de « Masters » à Toronto cet été. Les championnats du monde à Málaga, en Espagne, en 2018.

Son défi d’ici là : ne pas courir trop vite, ne pas trop courir. Garder le bon rythme pour aller encore plus loin.

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